Apports à l’histoire du spiritisme
Introduction
Il y a quelques années est arrivé à l’Union Spirite Française et Francophone (USFF) à Tours (l’USFF est aujourd’hui disparue) un envoi émanant d’un descendant et membre de la famille Hubert Forestier. Celui-ci fut militant spirite, ancien directeur de « La Revue Spirite » au temps de Jean Mayer. Cet envoi était constitué par une photo encadrée d’Allan Kardec et d’un certain nombre de documents officiels concernant l’état civil d’Allan Kardec, d’Amélie Boudet, dont leur acte de mariage officiel.
Nous avons le plaisir de partager avec nos lecteurs l’une de ces lettres écrite par Allan Kardec à Amélie Gabrielle Boudet, au cours de son 2° voyage spirite (1) à certains centres spirites des villes de Sens, Mâcon, Lyon et Bordeaux, en septembre 1861. Ces visites étaient pour Allan Kardec en moyen de fraterniser et de militer pour l’unification et la cohésion du mouvement spirite français, d’alors. Ses discours, les conseils dispensés, en sont la preuve. (2) et (3)
Cette lettre est vraiment démonstrative de l’affection d’Hippolyte Léon Denizard Rivail, (pseudonyme Allan Kardec) pour son épouse et des liens étroits qui les réunissaient, en tant qu’époux, de même que dans le cadre de leur coopération mutuelle en faveur de la doctrine spirite.
Voici le contenu de cette lettre :
Lyon 20 Sept. 1861.
Ma chère Amélie :
Je t’écris de nouveau sous l’impression de l’émotion de la journée d’hier, ce sont de ces événements qui laissent dans la vie des traces ineffaçables. C’était, comme je te l’ai dit, le jour d banquet ; il y avait plus de 160 personnes ; c’était à qui pourrait me serrer la main, me toucher même ; ceux qui ont pu me parler étaient, je crois, aussi heureux que s’ils avaient parlé à un roi ; un peu plus il y en a qui, s’ils l’eussent osé, auraient baisé le pan de ma redingote tant était grand leur enthousiasme.
Je laisse à penser si les discours ont été chaleureux. Le mien a produit une sensation profonde, ainsi que celui d’Eraste que tout le monde a justement applaudi et apprécié !
(force m’a été d’interrompre ma lette et je ne puis la reprendre qu’aujourd’hui samedi)
Pour en revenir au banquet, c’était une chose à la fois admirable et touchante ; le commissaire de Police qui y avait été invité a pleuré d’émotion, et m’a serré les mains avec effusion. Après mes discours, j’ai parlé d’abondance pendant près de trois quarts d’heure, sans préparations, sans dessein prémédité et sans être le moins du monde intimidé devant cette nombreuse assemblée, où des personnes sont venues tout exprès de Mâcon et autres lieux pour y assister.
Hier vendredi j’ai visité des groupes sur différents points de la ville et distants de plus d’une lieue les uns des autres ; là le même accueil, le même enthousiasme ; j’ai parlé depuis 10 h1/2 du matin jusqu’à 9 heures du soir, sauf l’interruption des trajets ; Je suis rentré extenué.
Ce matin je suis allé prendre un bain qui m’a fait beaucoup de bien. Ce soir je vais à une autre réunion, mais plus aristocratique, où j’aurai encore bien des paroles à dire.
Ce n’est plus par centaines que l’on compte les spirites à Lyon, c’est par milliers. Partout il y a des médiums, et dans le nombre j’en ai vu des très bons. Dans l’un des groupes, il y avait un sergent de ville très bon médium et très bon spirite ; puis un forgeron, à la figure et à la tournure de cyclope, également très bon médium ; homme grave, intelligent et qui parmi les siens fait de nombreux prosélytes. Il est chef d’un groupe à Vaise, et comme je n’ai pu y aller, il y est venu ainsi que plusieurs de ses adeptes à une des réunions de la ville. En résumé, je trouve ici un progrès que j’étais loin d’espérer, et ce qu’il y a de particulier, c’est que partout on ne s’occupe du Spiritisme qu’au point de vue sérieux.
Toutes les fois que j’ai entamé le chapitre des expériences physiques, j’ai vu que cela intéressait peu ; mais on était tout oreille, quand il s’agissait des conséquences morales et philosophiques. Mon voyage aura incontestablement un retentissement immense, et fera un grand bien même vis-à-vis de l’autorité. Le parti noir seul ne peut qu’en être horriblement contrarié !
Mon temps a tellement été pris, que je n’ai pu aller voir personne de ma connaissance. Je comptais repartir demain dimanche, mais comme je tiens à voir M. et Mme Rigolet, j’irai à leur campagne, ce qui renvoie mon départ à lundi. J’arriverai à Paris mardi à midi.
Ton bien affectionné
HLDR.
Biographie
Toutes ses informations ont été recueillies sur les sites internet en rapport avec « Voyage spirite en 1862 », du Centre Spirite Lyonnais Allan Kardec. De « Revue Spirite – Organe du Conseil Spirite Internationale », article de Miguel Ramos. (p. 7). 4º trimestre de 2011, pp. 6 e 9.
(1) – Le 1° voyage spirite d’Allan Kardec avait eu lieu en août de 1860, au centre spirite de Brotteaux, ce fut la première rencontre, en France, de dirigeants spirites dans l’histoire do spiritisme.
(2) – Lors de son 2° voyage spirite Allan Kardec, nous l’avons vu dans sa lettre ci-dessus, a pu constater les progrès et le grand nombre des nouveaux groupes formés depuis un an.
(3) – Le 3° voyage d’Allan Kardec fut fait de visites dans presque toutes les régions de France, ce fut un véritable parcours missionnaire, puisque il n’a pas manqué d’orienter, d’éclairer et de renforcer la cohésion du mouvement spirite. C’est suite à ce voyage qu’il a décidé d’écrire « Voyage Spirite de 1862 » riche d’enseignements et un aide indispensable aux groupes spirites.