Allan Kardec et la manifestation des Esprits.

Dans la Revue Spirite parue en janvier 1858, Allan Kardec écrivait : « La rapidité avec laquelle se sont propagés dans toutes les parties du monde les phénomènes étranges des manifestations spirites est une preuve de l’intérêt qu’ils excitent. »

L’existence des Esprits, et leur intervention dans le monde corporel, est attestée et démontrée, non plus comme un fait exceptionnel, mais comme un principe général, dans saint Augustin, saint Jérôme, saint Chrysostome, saint Grégoire de Nazianze et beaucoup d’autres Pères de l’Eglise. Cette croyance forme en outre la base de tous les systèmes religieux. Les plus savants philosophes de l’antiquité l’ont admise : Platon, Zoroastre, Confucius, Apulée, Pythagore, Apollonius de Tyane et tant d’autres.

Nous la trouvons dans les mystères et les oracles, chez les Grecs, les Egyptiens, les Indiens, les chaldéens, les Romains, les Perses, les Chinois. Nous la voyons survivre à toutes les vicissitudes des peuples, à toutes les persécutions, braver toutes les révolutions physiques et morales de l’humanité.

Plus tard nous la trouvons dans les devins et sorciers du moyen-âge, dans les Willis et les walkiries des Scandinaves, les Elfes des Teutons, les Leschies et les Domeschnies Doughi des Slaves, les Ourisks et les Brownies de l’Ecosse, les Poulpicans et les Tensarpoulicts des Bretons, les Cémis des Caraïbes, en un mot dans toute la phalange des nymphes, des génies bons et mauvais, des sylphes, des gnomes, des fées, des lutins dont toutes les nations ont peuplé l’espace.

Nous trouvons la pratique des évocations chez les peuples de la Sibérie, au Kamtchatka, en Islande, chez les Indiens de l’Amérique du Nord, chez les aborigènes du Mexique et du Pérou, dans la Polynésie et jusque chez les stupides sauvages de la Nouvelle-Hollande.

De quelques absurdités que cette croyance soit entourée et travestie selon les temps et les lieux, on ne peut disconvenir qu’elle part d’un même principe, plus ou moins défiguré ; or, une doctrine ne devient universelle, ne survit pas à des milliers de générations, ne s’implante pas d’un pôle à l’autre chez les peuples les plus dissemblables, et à tous les degrés de l’échelle sociale, sans être fondée sur quelque chose de positif.

Quel est ce quelque chose ? C’est ce que nous démontrent les récentes manifestations et toutes ces croyances, c’est chercher la vérité. L’histoire de la doctrine spirite est en quelque sorte celle de l’esprit humain ; nous aurons à l’étudier à toutes ses sources, qui nous fourniront une mine inépuisable d’observations aussi instructives qu’intéressantes sur des faits généralement peu connus.

Cette partie nous donnera l’occasion d’expliquer l’origine d’une foule de légendes et de croyances populaires, en faisant la part de la vérité, de l’allégorie et de la superstition.

Pour ce qui concerne les manifestations actuelles, nous rendrons compte de tous les phénomènes patents dont nous serons témoins, ou qui viendront à notre connaissance, lorsqu’ils nous paraîtront mériter l’attention de nos lecteurs. Il en sera de même des effets spontanés qui se produisent souvent chez les personnes même les plus étrangères à la pratique des manifestations spirites, et qui révèlent soit l’action d’une puissance occulte, soit l’indépendance de l’âme ; tels sont les faits de visions, apparitions, double vue, pressentiments, avertissements intimes, voix secrètes, etc.

A la relation des faits nous ajouterons l’explication telle qu’elle ressort de l’ensemble des principes. Nous ferons remarquer à ce sujet que ces principes sont ceux qui découlent de l’enseignement même donné par les Esprits, et que nous ferons toujours abstraction de nos propres idées. Ce n’est donc point une théorie personnelle que nous exposerons, mais celle qui nous aura été communiquée, et dont nous ne serons que l’interprète.

Une large part sera également réservée aux communications écrites ou verbales des Esprits toutes les fois qu’elles auront un but utile, ainsi qu’aux évocations des personnages anciens ou modernes, connus ou obscurs, sans négliger les évocations intimes qui souvent ne sont pas les moins instructives ; nous embrasserons, en un mot, toutes les phases des manifestations matérielles et intelligentes du monde corporel.

La doctrine spirite, nous offre enfin la seule solution possible et rationnelle d’une foule de phénomènes moraux et anthropologiques dont nous sommes journellement témoins, et dont on chercherait vainement l’explication dans toutes les doctrines connues.

Nous rangerons dans cette catégorie, par exemple, la simultanéité des pensées, l’anomalie de certains caractères, les sympathies et les antipathies, les connaissances intuitives, les aptitudes, les propensions, les destinées qui semblent empreintes de fatalité, et dans un cadre plus général, le caractère distinctif des peuples, leur progrès ou leur dégénérescence, etc. A la citation des faits nous ajouterons la recherche des causes qui ont pu les produire.

De l’appréciation des actes, il ressortira naturellement d’utiles enseignements sur la ligne de conduite la plus conforme à la saine morale. Dans leurs instructions, les Esprits supérieurs ont toujours pour but d’exciter chez les hommes l’amour du bien par la pratique des préceptes évangéliques ; ils nous tracent par cela même la pensée qui doit présider à la rédaction de ce recueil.

 

 


 

Bibliographie

 

Cet article est un extrait de l’article publié par Allan Kardec dans la Revue Spirite, n° de janvier de 1858.